Introduction
Les collections de photographies documentaires au tournant du XXe siècle
À la fin du XIXe siècle, quelque cinquante ans après l’invention de la photographie, la production d’images connaît une croissance exponentielle dans les pays industrialisés. Tandis que la pratique photographique se démocratise avec l’avènement de la plaque sèche et du support filmique, de nouveaux moyens de reproduction photomécanique permettent de multiplier les illustrations à moindre coût dans des imprimés toujours plus nombreux. Les historiens tentent aujourd’hui de prendre la mesure de cet essor, d’en comprendre la signification et son impact sur les sociétés. De multiples aspects sont concernés, de l’expansion des pratiques amateurs aux mutations de la presse illustrée, des constructions symboliques de l’identité, du lointain ou de l’histoire à l’essor des sciences humaines, favorisé en maints domaines par celui de la photographie. Mais la confrontation au nouveau régime de la profusion photographique a également eu de fortes incidences sur les institutions patrimoniales, musées, archives et bibliothèques, et sur les modes de collection des images, qui se sont vus transformés en profondeur. Si pendant ses premières décennies, en effet, la photographie avait pu être confinée dans l’espace restreint du cadre, du panneau mural, de l’album ou de l’atlas, sa propagation pose rapidement la question de réceptacles plus larges, et nécessairement distincts du modèle d’accumulation des livres aussi bien que de celui des œuvres d’art. Elle entraîne en particulier l’apparition, au tournant du XXe siècle, de collections d’un nouveau type : ce que l’on appelle alors les « musées de photographies documentaires », dont l’une des missions est précisément d’organiser et de donner un sens à la production pléthorique et désordonnée des images.
Dès la fin du XIXe siècle, clubs et journaux spécialisés relaient des appels à exploiter collectivement le potentiel documentaire de la photographie. En Grande-Bretagne, en France, en Allemagne, mais aussi en Suisse, en Italie, en Pologne, en Russie ou aux États-Unis, des campagnes de prises de vues sont lancées au sein des associations d’amateurs afin d’inventorier, de valoriser ou de préserver par la photographie le patrimoine historique et les traditions locales1. À cet élan collectif de production documentaire répond un besoin symétrique de création de structures capables d’accueillir et de canaliser ces nouveaux flux d’images, d’archiver et de comprendre le visible à travers une conservation organisée des photographies. L’histoire bouillonnante de ces institutions, entre 1885, année du premier appel du Britannique William Jerome Harrison, et 1906, date du premier (et dernier) Congrès international de la documentation photographique à Marseille, est redécouverte depuis peu à la faveur d’une série de recherches menées dans différents pays2. En rassemblant des études d’horizons variés, le présent dossier se propose de resituer l’avènement des musées de photographies documentaires et des collections visuelles apparentées dans une perspective transnationale. Il se veut une contribution au riche ensemble de travaux menés depuis quelques années sur l’histoire des collections de photographies dans les musées, les archives et les bibliothèques3, objets de recherche qui permettent de mieux comprendre la « vie sociale » des photographies4, la valeur qui leur est attribuée, la multiplicité des significations et des fonctions qui leur sont prêtées. Parmi ces collections, le Musée de photographies documentaires joue un rôle particulier. Alors que dans la plupart des institutions patrimoniales, la photographie reste traitée comme un document secondaire en marge d’autres fonds5, ces musées la placent au cœur de leur projet.
Ce dossier est issu d’un colloque organisé en novembre 2015 à l’université de Lausanne et à l’université de Genève6. Il s’est tenu dans le cadre de l’exposition du musée de l’Élysée à Lausanne consacrée à la collection iconographique vaudoise, réunie dès 1896 par le pasteur, photographe et historien amateur Paul Vionnet sous le nom originel de Musée historiographique (fig. 1). Ce fonds de plusieurs centaines de milliers d’images constitue non seulement l’un des ensembles fondateurs de l’actuel musée de la photographie de Lausanne, mais aussi l’un des rares exemples de musée de photographies documentaires ayant échappé à la dispersion au fil du XXe siècle et pouvant encore aujourd’hui être appréhendé dans son intégrité relative7. À l’occasion de l’exposition du musée de l’Élysée, une publication spécifique lui a été dédiée, en partenariat avec la Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne8. Si celle-ci s’ouvrait déjà à l’exemple voisin du Musée suisse de photographies documentaires à Genève (1901-1909), le présent dossier entend la prolonger en élargissant la focale à l’échelle européenne.
1. [Paul Vionnet], Musée historiographique, Lausanne, avant 1914, tirage au gélatino-bromure d'argent, 171 x 232 mm. Lausanne, musée de l'Élysée, collection iconographiqe vaudoise (MEL 049661).

Diversité des acteurs, diversité des collections

Loin de constituer un modèle homogène, les collections documentaires recouvrent en réalité une grande variété de pratiques et de formes. Leurs fondateurs eux-mêmes se révèlent très divers. L’initiative peut venir de particuliers – qu’ils soient photographes comme Paul Vionnet, mécènes philanthropes, historiens de l’art, conservateurs ou bibliothécaires – aussi bien que d’entités collectives – associations photographiques, sociétés savantes, voire firmes commerciales. Le plus souvent, c’est précisément de la rencontre de cercles photographiques et de sphères savantes qu’émergent les projets. La production du document photographique n’est ainsi aucunement du ressort des seuls photographes : elle est le produit d’un ensemble complexe de forces créatives qui sélectionnent, conservent, classent, communiquent les images pour créer collectivement de nouvelles ouvertures sur le monde9. Les initiatives peuvent par ailleurs impliquer d’emblée un soutien public, étatique ou municipal, ou le réclamer en vain, et chercher leur place dans des institutions patrimoniales existantes, bibliothèques ou musées, ou encore préférer la création de structures autonomes.
Les projets diffèrent en outre profondément selon l’aire thématique ou géographique considérée. Si nombre d’entre eux se concentrent sur le patrimoine architectural ou artistique, certains étendent leur définition de la culture aux paysages, aux traditions ou aux portraits des populations, pendant que d’autres prétendent couvrir l’ensemble du visible. Surtout, ils déploient une gamme très large de variantes entre célébration du local et prétention à l’universel. À l’instar de ce qui se pratique au Musée historiographique vaudois, les initiatives britanniques, allemandes ou italiennes examinées dans ce dossier sont destinées avant tout à mettre en valeur une histoire et un patrimoine régionaux. D’autres, comme le Musée suisse de photographies documentaires (fig. 2), se situent plutôt à l’échelle nationale. Mais certains ne se fixent au contraire aucune limite a priori. C’est le cas du Musée des photographies documentaires de Léon Vidal à Paris (1894-1907) ou encore de l’Association des photographies documentaires (1901) et de l’Institut international de photographie (1905) créés en Belgique par Ernest de Potter et où l’on imagine « une encyclopédie universelle de l’image, un musée des musées, un vaste panorama du monde et de ce qu’il contient, un inventaire illustré de tout ce qui a existé, existe et existera et qui est susceptible d’une représentation graphique10 ». Pour toute une part de ce mouvement, c’est explicitement l’universel que l’on vise, comme si l’archivage en masse des images appelait par nature un projet universaliste. Cela vaut emblématiquement pour les Archives de la planète d’Albert Kahn à Boulogne (1909-1931), mais aussi pour les discussions menées au congrès de Marseille où, en présence du militant internationaliste Paul Otlet, des réflexions sont consacrées à la manière de fédérer mondialement le mouvement. Leurs modèles de l’universalisme photographique s’avèrent cependant très différents. Si à Boulogne, on vise à centraliser en un lieu des images – et potentiellement des publics – provenant du monde entier, à Marseille, on imagine plutôt cet archivage universel sous la forme du réseau et de l’échange, dans une logique internationaliste qui, paradoxalement, entérine la dimension éminemment locale de nombre de ces collections.
Qu’elles soient locales ou universelles cependant, toutes ou presque résultent d’un échange d’idées mené par le biais des clubs, des congrès, des journaux, des expositions, et par l’action transnationale de quelques acteurs clés comme William Jerome Harrison, Léon Vidal, Ernest de Potter, Paul Otlet ou Albert Kahn. L’un des objectifs de ce dossier est d’esquisser une géographie du mouvement, d’évoquer la circulation des hommes, des techniques et des idées dont ces collections sont le produit, et l’interaction des intentions, des aspirations et des conceptions multiples de l’image photographique à leur origine.
2. Eugène Demole, « Rue du Marché, 10 », vers 1900, négatif sur verre, 130 x 180 mm. Genève, Centre d’iconographie de la Bibliothèque de Genève (VG N13x18 0111).
C’est au Comptoir de photographied’Eugène Demole à Genève qu’était situé le Musée suisse de photographies documentaires.

Pluralité de la photographie

Dans le même temps, les différents auteurs de ce dossier portent une attention particulière à la matérialité des documents et des fonds, une matérialité qui conditionne le sens, la valeur, les usages attribués aux photographies et leur performativité.
Le terme générique de « photographies » utilisé en titre recouvre en réalité des objets fort divers. Dans ces collections se côtoient toutes sortes de phototypes, négatifs sur verre, sur film ou sur papier, tirages sur supports variés, plaques de projection, autochromes, mais aussi nombre de cartes postales ou de coupures de presse illustrée – formes imprimées de la photographie qui, loin d’être secondaires, dominent certains de ces fonds, à l’instar du Répertoire iconographique universel de Paul Otlet et Ernest de Potter. C’est bien la photographie dans toute sa pluralité que les musées de photographies documentaires ont cherché à prendre en compte, même si cette diversité de matériaux, de formes et de statuts va certainement constituer l’un des principaux obstacles à leur reconnaissance institutionnelle. Autant en effet l’homogénéité apparente de la collection d’autochromes des Archives de la planète a contribué à la pérennité et à la valorisation de l’ensemble, autant l’hétérogénéité des supports collectés à Paris, Bruxelles, Genève ou Lausanne n’a fait que renforcer le statut incertain longtemps accordé à la photographie dans les archives d’institutions patrimoniales, notamment les musées11.
L’histoire de ces collections est, de façon générale, l’histoire de tentatives souvent inabouties et dont il ne subsiste aujourd’hui que des traces extrêmement parcellaires. Nous postulons néanmoins que ces projets représentent un moment fondamental de l’histoire de la photographie. Alors que la seconde grande vague de création de «musées de la photographie » à la fin du XXe siècle valorisera, sur le modèle du musée d’art, la rareté, l’image exceptionnelle, et tendra à privilégier le tirage argentique sur toute autre forme de support, les musées de photographies documentaires se confrontent très directement à la nature profuse et hétérogène de la photographie et à l’indétermination de son statut. Bien avant que ne se propage l’idée d’« iconothèque » ou de « photothèque » – catégories qui ne s’imposeront que dans l’entre-deux-guerres –, puis celle de « banques d’images » – qui en entérinant une nouvelle pensée de la collection photographique comme ressource économique, tendra à son tour à homogénéiser les images, ici sur le modèle de l’argent12 –, ces musées représentent la première tentative de concevoir des structures patrimoniales à même d’accueillir la photographie dans sa pluralité. Il s’agit alors pour eux de donner sens à la masse en l’organisant plutôt qu’en la réprimant ou en la filtrant.
À en croire les débats, notamment ceux tenus à Marseille, les responsables de ces collections reconnaissent en effet que l’essor de la photographie n’a pas seulement signifié l’avènement d’une nouvelle forme de signe, indiciel et particulièrement riche en détails, mais a aussi impliqué le nécessaire développement d’instruments pour inventorier, classer, conserver et rendre accessibles les images en grand nombre. C’est précisément à la croisée de ces deux conditions – une image d’un nouveau type et de nouvelles structures d’administration du visuel – que s’esquisse à l’époque l’idée même du document photographique13. Si, de façon générale, les tentatives de définir ce qui constitue une « photographie documentaire » s’avèrent étonnamment rares parmi les têtes pensantes du mouvement, on est frappé par le primat accordé alors au traitement archivistique des images – les modes de conservation, d’indexation, de classement – sur les critères qui leur sont intrinsèques, qu’il s’agisse de prescriptions de forme ou de contenu. À en croire les discussions menées alors, aucune photographie ne semble documentaire en soi : chacune serait susceptible de le devenir par son inscription dans une structure appropriée.
Pour les administrateurs de ces fonds, il s’agit de donner sens à la production et à l’utilisation des photographies en organisant leur vie présente et future comme documents, et de conférer rationalité au « monde-image14 » qui prend alors forme. Pour cela, une identité est assignée à chaque nouvelle entrée par l’intermédiaire de métadonnées, consignées dans un registre ou sur une fiche – objet primordial de l’organisation du savoir promu par Paul Otlet et que le congrès de Marseille ambitionne d’étendre aux images. Leur signification flottante est « ancrée » par l’ajout d’une légende, la volatilité de leur support atténuée par leur contre-collage sur carton ou par leur rangement dans des boîtes numérotées, leur caractère fragmentaire compensé par leur regroupement au sein d’ensembles cohérents.
Au bout du compte, l’archivage permet non seulement d’organiser la visibilité des photographies, mais aussi de leur conférer une forme d’autorité, de stabilité, et de les transformer en « objets culturels à part entière15 ». Loin du reproche fréquemment adressé à la photographie dans les décennies qui suivront, celui d’un débordement de fragments visuels insignifiants empêchant une véritable compréhension du monde et émoussant à terme le sensible, on voit alors dans le rassemblement des images une accumulation productrice de sens, porteuse de promesses autant pour le partage des savoirs et l’échange entre les peuples que pour la préservation effective de la mémoire.

Temps et espaces de la modernité

Ces collections peuvent être comprises aujourd’hui comme un produit de la « modernité16 » et de ses multiples possibles au tournant du XXe siècle. Elles mettent à profit ses objets et ses médias, alors que l’image, les nouveaux modes de reproduction photomécaniques pour l’impression et les techniques d’enregistrement récentes – la photographie, le cinématographe, le phonographe – se répandent dans les sociétés et suscitent toutes des projets d’archivage généralisé du monde, portés par une croyance partagée dans le progrès scientifique et technique. Elles s’appuient également sur de nouvelles pratiques du savoir, au moment où les bibliothèques, les musées, les sociétés savantes se multiplient et où l’accès à l’éducation se démocratise. Comme Elizabeth Edwards l’a montré pour les campagnes de photographies documentaires en Angleterre, elles reflètent aussi cette autre face de la modernité que sont le goût du passé, la sensibilité nouvelle pour le patrimoine artistique, architectural, monumental et l’écriture de l’histoire – sensibilité autant promue par les érudits que soutenue par le développement des loisirs dans la bourgeoisie européenne17.
Ces initiatives répondent ainsi aux bouleversements de la perception du temps et de l’espace dont témoignent au même moment écrivains, penseurs et artistes18. Face à un sentiment d’accélération du temps et de changement inexorable, ces collections sont supposées pallier l’effacement de la mémoire, dans la lignée des nombreux projets destinés à mettre la photographie au service de l’histoire depuis son invention19. Elles reposent ainsi sur le sentiment toujours grandissant de l’éphémère qui, étendant désormais son emprise du vivant au bâti, des paysages aux œuvres d’art, des coutumes aux parlers, appellerait partout des entreprises de sauvegarde. Ce sentiment d’urgence face à la disparition accélérée des choses marque alors tous les « nouveaux médias » d’enregistrement, ceux-là mêmes qui participent pourtant à bouleverser en profondeur les cultures et les sociétés qu’ils prétendent fixer. Cela vaut autant pour l’image animée, avec le projet de « dépôt de cinématographie historique » de Boleslas Matuszewski en 1898, que pour la captation du son, avec les premières archives phonographiques (Phonogrammarchive) fondées à Vienne et à Berlin autour de 1900.
La collecte de photographies étendue du local à l’ailleurs fait également écho à la contraction de l’espace engendrée par le développement du chemin de fer, de la navigation à vapeur, bientôt de l’automobile, qui facilitent les voyages proches ou lointains, exacerbent le goût des paysages, étirent et densifient tout à la fois le champ des objets d’intérêt. Si la prolifération des images contribue à rendre plus familier ce monde rapproché, leur collecte et leur mise en boîte reflètent la propension des sociétés occidentales à fixer, classer, ordonner le réel à l’aide d’outils encyclopédiques20. Leur accumulation dans des ensembles voués à accueillir tous les aspects du visible participe à la mise en place de nouveaux régimes visuels marqués par une hypertrophie du regard21 et une tendance à la spectacularisation du réel, transformant le monde en un objet appréhendable dans sa totalité.

Mise en scène de la nation et de l’universel

De nombreux objets et techniques ont été développés au cours du XIXe siècle pour répondre à ce désir de voir le monde dans sa totalité, des panoramas à la presse illustrée22. Les collections de photographies documentaires peuvent être envisagées comme une nouvelle étape dans ce processus de captation et de réduction du monde par l’image. Elles prolongent la mission confiée jusqu’alors, par-delà les panoramas, aux atlas ou aux géoramas, celle d’aider le public sédentaire à penser l’espace et à développer une « conscience géographique », comme l’a montré Jean-Marc Besse23. Elles transforment la ville, la région, la nation, l’ailleurs et le passé en un spectacle ordonné. Cette façon d’envisager le monde comme une exposition par le biais de l’image24 n’est pas sans lien avec les expositions universelles, où la photographie est d’ailleurs omniprésente et où se forment justement certains des réseaux fondateurs des musées de photographies documentaires. Comme elles, ces collections contribuent aussi à élaborer les récits nationaux, à une période cruciale dans l’affirmation des États-nations.
Des travaux portant sur le lien entre la photographie et l’imaginaire géographique ont rappelé combien les pratiques photographiques ont façonné les idées, individuelles et collectives, de paysage et d’identité25. Le rôle des archives photographiques dans la fabrication des imaginaires nationaux a également été souligné26. En « adhérant » au réel tout en l’interprétant et en l’esthétisant, la photographie suscite émotions et affects, et elle facilite d’autant plus facilement le sentiment d’identification que son pouvoir de narration peut contribuer à donner de la cohérence aux récits collectifs27. Les études menées sur les campagnes de photographies organisées à la même période de la Grande-Bretagne à la Russie montrent que ces entreprises de documentation nationales, ancrées dans des contextes politiques et culturels très différents, présentent de grandes similitudes et se répondent les unes aux autres28. Cette tension entre le local et l’international est propre au mouvement de fabrication des imaginaires nationaux29. Il l’est aussi à celui de constitution des musées à travers le monde30.
Comme eux, on l’a dit, les collections de photographies documentaires ne cessent d’être tiraillées entre ces échelles multiples et entre les logiques difficilement compatibles d’affirmation d’identités régionales ou nationales et de visées universelles. Alors même qu’elles sont le résultat de circulations de personnes, de transferts d’idées et de techniques, nombre d’entre elles ne peuvent être dissociées de la construction des États-nations. Elles facilitent la reconnaissance d’un patrimoine spécifique en mettant en valeur des styles architecturaux, des costumes, des paysages particuliers, et permettent à leur public de s’approprier ces modèles grâce à la réduction d’échelle opérée par l’image. Elles contribuent ainsi à fonder des « communautés de destin », en servant d’opérateurs permettant de sémiotiser l’espace et de lui donner sens à des niveaux multiples31.

Histoires d’un échec ?

Ces projets n’ont pour la plupart connu que des durées de vie limitées et, comme le montrent les études qui suivent, ces échecs ont été imputés à des motifs très divers. À l’époque, les responsables accusent volontiers le manque de reconnaissance de la photographie auprès des institutions et des pouvoirs publics. D’autres invoquent plutôt le soutien insuffisant ou le rapide essoufflement des photographes dans l’approvisionnement de ces fonds, soit la difficulté à donner une véritable dimension collective à des projets pourtant fondés sur la mise en commun des images. Mais avec le recul, on peut tout autant pointer, comme le fait Éléonore Challine, la crainte inverse, celle de l’envahissement, suscitée par un médium à la reproductibilité sans limite. Entre les deux, tout le paradoxe de ces entreprises est de n’avoir cessé d’appeler à l’élargissement de la participation et à l’extension des collections, tout en justifiant leur mission par la nécessité de dompter le flux incontrôlé de sources visuelles libéré par la photographie. On semble ne jamais avoir tout à fait su, en somme, s’il s’agissait de collectionner pour stimuler ou pour endiguer la production des images photographiques.
En outre, s’il a manifestement été difficile de motiver les producteurs, il paraît avoir été tout aussi délicat de trouver à ces fonds un véritable public et de justifier leur existence par les besoins d’utilisateurs clairement identifiés. Autant des ensembles plus tardifs, comme la Picture Collection de la New York Public Library, sous la direction de Romana Javitz dès 1929, réussiront à attirer des usagers en nombre, autant, pour maints fonds européens, rapidement basculés dans des collections d’histoire locale, c’est avant tout le passage du temps et l’amplification progressive de leur valeur historique qui élargiront finalement le cercle des utilisateurs.
De façon plus profonde, les concepteurs de ces collections semblent avoir eu des difficultés à s’entendre sur leurs objectifs et sur les moyens à mettre en œuvre pour sélectionner, conserver et communiquer les documents. Plusieurs articles dans Transbordeur reviennent sur le flou conceptuel entourant les termes de «musées », d’« archives », voire de « bibliothèques » utilisés alors pour dénommer les institutions destinées à héberger ces collections, et sur les débats que ces catégorisations ont fait naître. En vérité, ni le Musée des photographies documentaires de Paris ni sa réplique genevoise n’ont jamais pris la forme d’un «musée», dans la mesure où ils sont restés de pures structures de stockage sans fonction d’exposition. À l’inverse, les Archives de la planète n’ont jamais désigné un dépôt de documents préexistants, mais bien plutôt une structure de production documentaire visant à alimenter une collection ciblée plus qu’un fonds d’archives au sens propre. Ces flottements lexicaux, discutés notamment par Teresa Castro et Valérie Perlès à propos de l’entreprise d’Albert Kahn, renvoient alors autant à l’imprécision des projets eux-mêmes – tiraillés entre transfert de connaissances, conservation d’objets patrimoniaux et la part de spectacle impliquée par l’idée de musée – qu’à celle du statut et des usages pluriels de la photographie.
La dimension utopique de ces entreprises a aussi été avancée par les contemporains pour expliquer leur échec32. On peut cependant les comparer aux bibliothèques, elles aussi issues d’une idée a priori utopique, celle de « faire coexister dans un même espace toutes les traces de la pensée humaine confiée à l’écrit33 ». Les bibliothèques sont d’ailleurs explicitement prises en modèle pour la gestion des photographies autour de Paul Otlet, d’Hippolyte Sebert et du congrès de Marseille, où l’on rêve à des « collections qui doivent être, pour l’image, ce que sont les bibliothèques pour les textes imprimés34 ». Comme elles, ces différents ensembles témoignent de ce que des sociétés ont décidé de transmettre mais qui ne prend son sens « que par le travail » de leurs utilisateurs, lecteurs ou spectateurs35. Leur histoire reflète précisément d’une part les tâtonnements qui ont accompagné l’émergence de nouveaux modèles d’organisation des connaissances au travers de l’image et d’autre part l’incertaine définition du rôle de la photographie comme outil patrimonial, scientifique ou pédagogique. Si les photographies tendent aujourd’hui à être reconnues comme des supports de savoir à part entière36, ces collections permettent de retracer la genèse de cette idée : elles ont contribué à inventer de nouveaux lieux de savoir dans lesquels la photographie ne serait plus seulement pensée en complément de l’écrit, mais dans sa force épistémologique propre. Elles constituent des jalons importants dans l’histoire de la conception de l’image photographique comme instrument de connaissance, de ses fonctions, de ses limites, et de la façon dont les sociétés l’utilisent pour se définir et se penser.
Dans ce dossier, Elizabeth Edwards revient sur les sources britanniques du mouvement pour souligner le rôle essentiel joué par les bibliothèques publiques – et par les bibliothécaires – dans la mise en place des collections de photographies documentaires. Elle montre comment le rassemblement de documents d’histoire locale dans ces institutions est allé de pair avec l’introduction en leur sein du principe du libre accès – aux images comme aux livres – et avec la promotion du savoir historique local, dans un processus plus large de démocratisation des connaissances et d’« autodidactisme » des citoyens.
Éléonore Challine examine quant à elle le premier « Musée des photographies documentaires » créé sous ce nom, celui de Léon Vidal à Paris. Elle révèle le rôle décisif joué par les milieux de l’édition et de l’imprimerie, qui accueillirent provisoirement la collection au siège de leur syndicat, le Cercle de la librairie. Partant de là, elle pointe les difficultés à trouver un lieu d’hébergement permanent et un véritable ancrage institutionnel pour ce « musée de papier » : l’accumulation d’images reproductibles destinées prioritairement à la dissémination imprimée semble mettre à mal l’idée même de musée et son principe de fixation d’objets singuliers en un lieu public unique.
Christian Joschke étend l’investigation au cas allemand et souligne la diversité des conceptions de l’histoire, de la culture, de la région et de la nation qui ont pu présider à la constitution de ces collections. Dans une comparaison avec le modèle britannique, porté par une dynamique similaire d’interactions serrées entre clubs photographiques et sociétés savantes à un niveau local, il souligne combien en Allemagne, l’affirmation d’une identité régionale a moins visé l’inventaire historique et monumental que la fixation des traditions populaires, et comment l’ethnographie régionale y a pris le pas sur l’histoire, le folklore sur le grand récit national.
En Italie, comme l’explique Tiziana Serena, ce sont les historiens de l’art bien plus que les milieux photographiques qui vont dominer les principales réalisations de projets de collections documentaires publiques, et l’espace du musée d’art qui va prioritairement accueillir ces ensembles. Si ce cadre hautement valorisé leur confère un surcroît de légitimité, l’ambition encyclopédique qui avait porté le mouvement au niveau européen est revue à la baisse pour se resserrer sur la documentation du patrimoine artistique et monumental national, et le public potentiel sur les seuls experts du domaine.
C’est précisément l’idéal universaliste du mouvement européen que souligne pour sa part Luce Lebart. Revenant sur le Congrès international de la documentation photographique de Marseille en 1906, moment culminant d’une dynamique qui visait à fédérer ce qu’elle appelle une «Internationale documentaire », elle révèle le rôle déterminant joué par Hippolyte Sebert, président du congrès. Personnage longtemps négligé par l’historiographie, Sebert est à cette époque non seulement président du conseil d’administration de la Société française de photographie, mais également très impliqué dans le mouvement de normalisation internationale des objets et des supports de savoirs, ainsi que dans la promotion de la langue universelle, l’espéranto. À travers lui, les réflexions sur la documentation photographique se trouvent réinscrites dans un projet beaucoup plus vaste de quête d’une langue universelle – qu’elle soit parlée, écrite ou visuelle – et d’un partage sans frontières des connaissances.
Teresa Castro revient sur l’autre grand projet universaliste de la photographie de la Belle Époque, les Archives de la planète (1912-1931). L’auteure met en parallèle l’entreprise d’Albert Kahn et les Archives de la parole, créées à la même période afin de sauvegarder et d’étudier des témoignages des langues parlées conservées à l’aide du phonographe, sur le modèle du Phonogrammarchiv de Vienne. Cette approche comparatiste lui permet d’interroger l’histoire des notions d’« archive » et d’« atlas », et les interactions entre ces deux formes distinctes de mise en ordre des connaissances. L’imposition progressive du paradigme de l’archive aux collections réunissant images photographiques, vues animées et enregistrements sonores est ensuite analysée à l’aune du contexte de la modernité, marqué par une nouvelle perception du temps, par l’idée de progrès et par le développement de nouvelles techniques d’enregistrement et de reproduction mécanisée.
Béatrice de Pastre revient sur la place du théoricien Boleslas Matuszewski dans la généalogie des encyclopédies visuelles documentaires. Grâce à son opuscule Une Nouvelle Source de l’histoire du cinéma (Création d’un dépôt de cinématographie historique), publié en 1898 à Paris, le photographe polonais est connu par les historiens du cinéma comme l’un des premiers à avoir préconisé la constitution d’archives cinématographiques. L’auteure tisse des liens entre sa pensée et la création de musées de photographies documentaires. Elle remet aussi en question l’idée que l’appel de Matuszewski soit alors resté lettre morte, en interrogeant l’influence possible de ses écrits sur l’entreprise de collecte et de valorisation de la production cinématographique Lumière.
La section « Collections » prolonge ces études historiques par des présentations évoquant également l’actualité de ces ensembles patrimoniaux. Celles-ci étendent la réflexion à la gestion et à l’usage contemporains des collections, à l’évolution de leur sens et de leur valeur, aux nouvelles définitions du patrimoine qu’elles font émerger, aux défis conservatoires, théoriques ou éthiques qu’elles constituent, mais aussi aux multiples pistes de recherche qu’elles ouvrent.
Frank Kessler et Sabine Lenk élargissent la réflexion sur les collections documentaires du tournant du siècle à une production prioritairement commerciale, celle des plaques de lanterne pour l’enseignement de la société Ed. Liesegang. Ils proposent d’envisager cet ensemble, insaisissable comme entité matérielle mais reconstituable à partir des catalogues de la firme, comme une « collection virtuelle », dont ils entreprennent d’analyser la logique commerciale, les objectifs pédagogiques, les hiérarchies et les publics potentiels. Ils esquissent par là une méthode qui pourrait s’appliquer à d’autres ensembles, notamment à travers le grand projet de recherche européen « A Million Pictures. Magic Lantern Slide Heritage as Artefacts in the Common European History of Learning ».
Directrice du musée départemental Albert-Kahn, Valérie Perlès apporte une double expertise de chercheuse et de conservatrice du patrimoine sur l’histoire des Archives de la planète. L’auteure revient sur les objectifs – parfois contradictoires – de leur fondateur et de leur directeur scientifique, et sur le rapport au monde sous-tendant la production de cet ensemble patrimonial unique. Elle interroge l’évolution des enjeux scientifiques, idéologiques et pédagogiques afférents à l’exploitation du fonds depuis les années 1910, et les conséquences des choix de conservation de ces images sur leur lecture et leur interprétation au fil du temps. Elle présente enfin la politique de conservation et de recherche actuelle et les perspectives qui s’offrent pour de nouvelles mises en valeur de la collection.
Pour clore cet ensemble, Nicolas Schätti, conservateur du Centre d’iconographie de la Bibliothèque de Genève, présente un autre fonds patrimonial important de par sa taille et la richesse de son contenu, celui de l’atelier Boissonnas, en activité entre les années 1860 et 1970. Acquis récemment par la Ville de Genève, il comprend plus de 200 000 documents photographiques, accompagnés d’un vaste ensemble de sources écrites. Si la production de l’entreprise familiale témoigne de l’évolution des usages documentaires du médium, son plus célèbre représentant, Fred Boissonnas, a par ailleurs activement participé à l’histoire des musées de photographies documentaires, puisqu’il fut membre fondateur du Musée suisse de photographies documentaires.
La présentation du fonds Boissonnas signale la multiplicité des objets de recherche offerts par un tel ensemble et leurs implications dans une très grande variété de domaines de l’histoire culturelle. C’est là plus généralement la visée du présent dossier : suggérer la richesse des objets, des thématiques et des approches nouvelles que ces grands rassemblements d’images ouvrent à l’histoire de la photographie. C’est que de telles collections n’offrent pas seulement d’immenses continents iconographiques à explorer, elles invitent plus encore à étendre le champ de cette histoire de l’analyse des images elles-mêmes à une prise en compte plus large des modes d’organisation, d’agencement, de circulation de celles-ci, et à la diversité de leurs usages, rêvés ou effectifs.

Voir en particulier Elizabeth Edwards, The Camera as Historian. Amateur Photographers and Historical Imagination, 1885-1918, Durham, Duke University Press, 2012 ; Christian Joschke, Les Yeux de la nation. Photographie amateur et société dans l’Allemagne de Guillaume II. 1888-1914, Dijon, Les presses du réel, 2013. Un colloque a été organisé par Elizabeth Edwards et Ewa Manikowska pour mettre en perspective ces différents mouvements : « Survey Photography and Cultural Heritage in Europe (1851-1945). Expanding the Field », Institute of Art, Polish Academy of Sciences, Varsovie, 14-15 avril 2015.

Voir en particulier Éléonore Challine, Une Étrange Défaite. Les projets de musées photographiques en France (1850-1945), thèse de doctorat, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2014 (à paraître chez Macula) ; Anne Lacoste, Silvio Corsini, Olivier Lugon (dir.), La Mémoire des images. Autour de la Collection iconographique vaudoise, Gollion, Infolio, 2015 ; Luce Lebart, « Histoire de tiroirs, les premières bases de données photographiques », dans Traces, cent ans de patrimoine photographique en Suisse, Neuchâtel, Institut suisse pour la conservation de la photographie, Memoriav, 2004, p. 103-107 ; Idem, « Archiver les photographies fixes et animées. Matuszewski et ‹ l’Internationale documentaire › », dans Boleslas Matuszewski, Écrits cinématographiques, Paris, AFRHC, 2006 ; Idem, « Penser /classer les images », dans Paul Otlet, fondateur du Mundaneum (1869-1944). Architecte du savoir, artisan de la paix, Bruxelles, Les Impressions Nouvelles, 2010 ; Olivier Lugon, « Esthétique du document. Le réel sous toutes ses formes (1890-2000) », dans André Gunthert, Michel Poivert (dir.), L’Art de la photographie, Paris, Citadelles et Mazenod, 2007, p. 357-421 ; Ulrich Pohlmann, « Die vergessenen Fotomuseen. Zur Geschichte realisierter und unausgeführter Vorhaben in Deutschland », Fotogeschichte, vol. 10, nº 35, 1990, p. 14-20 ; Estelle Sohier, Ursula Baume Cousam, « Musée, histoire et photographie, le cas de Genève. Sur les traces du Musée suisse de photographies documentaires (1901-1909) », dans Anne Lacoste, Silvio Corsini, Olivier Lugon (dir.), La Mémoire des images, op. cit., p. 169-193.

Notamment Costanza Caraffa (dir.), Photo Archives and the Photographic Memory of Art History, Berlin/Munich, Deutscher Kunstverlag, 2011 ; Costanza Caraffa, Tiziana Serena (dir.), Photo Archives and the Idea of Nation, Berlin/Munich/Boston, De Gruyter, 2015 ; Elizabeth Edwards, Christopher Morton (dir.), Photographs, Museums, Collections. Between Art and Information, Londres/New York, Bloomsbury,2015 ; Joan M. Schwartz, «‘We MakeOur Tools and Our Tools Make Us.’ Lessons from Photographs for the Practice,Politics, and Poetics of Diplomatics », Archivaria, nº 40, 1995, p. 40-74.

Igor Kopytoff, « The Cultural Biography of Things. Commoditizationas Process », dans Arjun Appadurai (dir.), The Social Life of Things. Commodities in Cultural Perspective, Cambridge, Cambridge University Press, 1986, p. 64-94.

Elizabeth Edwards, Christopher Morton (dir.), Photographs, Museums, Collections, op. cit., p. 10.

« À l’image du monde. Musées etcollections de documentation visuelleet sonore autour de 1900 », colloque organisé par le Centre des sciences historiques de la culture et la Section d’histoire et esthétique du cinéma de l’université de Lausanne, le Département de géographie et environnementde l’université de Genève et le muséede l’Élysée, 5-6 novembre 2015. Il réunissait Jean-Marc Besse, EstelleBlaschke, François Brunet, Costanza Caraffa, Teresa Castro, Éléonore Challine, Raphaèle Cornille, Béatrice de Pastre, Elizabeth Edwards, Christian Joschke, Frank Kessler, Luce Lebart, Sabine Lenk, Ewa Manikowska, Shannon Perich, Valérie Perlès, Tiziana Serena, Jean-François Staszak, Ekaterina B. Tolmacheva et Susanne Ziegler. Les articles qui suivent traitent uniquement de projets photographiques européens, mais le colloque s’ouvrait également à des collections états-uniennes et russes, ainsi qu’aux archives sonores.

Au fil des décennies, les pièces non photographiques qui enrichissaient originellement la collection iconographique vaudoise (plans, livres, manuscrits, médailles, objets divers) seront reversées à d’autres musées ou archives.

Anne Lacoste, Silvio Corsini, Olivier Lugon (dir.), La Mémoire des images, op. cit. L’exposition du même nom s’est tenue au musée de l’Élysée du 18 septembre 2015au 3 janvier 2016.

Joan M. Schwartz, « ‘We Make Our Tools…’ », op. cit., p. 47.

Anonyme, « II. Notices et règles pour la formation du Répertoire iconographique universel », dans La Documentation et l’iconographie, extrait du Bulletin de l’Institut international de bibliographie, 1906, Bruxelles, Institut international de bibliographie, publication nº 78, 1906, p. 34.

Elizabeth Edwards, Christopher Morton (dir.), Photographs, Museums, Collections, op. cit., p. 8.

Voir Allan Sekula, « Trafics dans la photographie » (1981), dans Allan Sekula, Écrits sur la photographie, Marie Muracciole (trad. et dir.), Paris, Beaux-Arts de Paris éditions, 2013, p. 175-220, et « Entre les mailles du Net et la Grande Bleue (repenser le trafic des photos) », dans TITANIC’s Wake, Noël Burch (trad.), Cherbourg, Le Point du Jour, 2003, p. 11-37.

Sur la question du document, voir Gregg Mitman, Kelley Wilder (dir.), Documenting the World. Film, Photography, and the Scientific Record, Chicago, The University of ChicagoPress, 2016 – voir le compte rendu de l’ouvrage, infra, p. 212-213 –, ainsi que Olivier Lugon, « Esthétique du doccment. Le réel sous toutes ses formes (1890-2000) », op. cit., et Renate Wöhrer (dir.), Wie Bilder Dokumentewurden. Zur Genealogie dokumentarischer Darstellungspraktiken, Berlin, Kadmos, 2015.

Deborah Poole, Vision, Race and Modernity. A Visual Economy of the Andean Image World, Princeton,Princeton University Press, 1997.

Elizabeth Edwards, Raw Histories. Photographs, Anthropology and Museums, Oxford, Berg, 2001, p. 28.

Lire notamment à ce sujet Emmanuel Fureix, François Jarrige, La Modernité désenchantée. Relire l’histoire du XIXe siècle français, Paris,La Découverte (coll. « SH/Écrituresde l’Histoire »), 2015.

Elizabeth Edwards, The Camera as Historian, op. cit.

Christophe Charle, Discordance des temps. Une brève histoire de la modernité, Paris, Armand Colin, 2011, p. 17.

Ilsen About, Clément Chéroux, « L’histoire par la photographie », Études photographiques, nº 10, novembre 2001, p. 8-33.

Frédéric Chauvaud et al., « La Concordance des temps. Histoire, objets et catégories en construction au XIXe siècle », dans Alain Corbin (dir.), L’Invention du XIXe siècle, tome 1, Paris, Klincksieck/Presses de la Sorbonne Nouvelle, 1999, p. 141-152.

Quentin Deluermoz et al., « Le XIXe siècle au prisme des visual studies », Revue d’histoire du XIXe siècle, nº 49, 2014, p. 139-175.

Jean-Marc Besse, «Le panorama. Voir et connaître au XIXe siècle », dans Laurence Madeline, Jean-Roch Bouiller, « J’aime les panoramas ». S’approprier le monde, cat. exp. (12 juin–27 sept. 2015, Genève, Musée Rath), Paris/Marseille/ Genève, Flammarion/MuCEM/Musée d’art et d’histoire, 2015, p. 58-66.

Jean-Marc Besse, Face au monde. Atlas, jardins, géoramas, Paris, Desclée de Brouwer, 2003.

Timothy Mitchell, «The World as Exhibition », Comparative Studies in Society and History, vol. 31, nº 2, 1989, p. 217-236.

Joan M. Schwartz, James R. Ryan, Picturing Place. Photography and the Geographical Imagination, Londres, I. B. Tauris, 2003.

Costanza Caraffa, Tiziana Serena (dir.), Photo Archives and the Idea of Nation, op. cit. ; Christian Joschke, Les Yeux de la nation, op. cit.

Costanza Caraffa, Tiziana Serena (dir.), Photo Archives and the Idea of Nation, op. cit., p. 9.

Voir supra, p. 15, note 1.

Benedict Anderson, Imagined Communities. Reflections on the Origin and Spread of Nationalism, Londres, Verso, 1983 ; Anne-Marie Thiesse, La Création des identités nationales. Europe XVIIIe-XXe siècle, Paris, Seuil, 1999.

Andrea Meyer, Bénédicte Savoy (dir.), The Museum is Open. Towards a Transnational History of Museums 1750-1940, Berlin/Boston, De Gruyter, 2014.

François Walter, Les Figures paysagères de la nation. Territoire et paysage en Europe (XVIe-XXe siècle), Paris, Éditions de l’EHESS, 2004, p. 326.

Luce Lebart, « Histoire de tiroirs, les premières bases de données photographiques », op. cit., p. 103-107.

Marc Baratin, Christian Jacob (dir.), Le Pouvoir des bibliothèques. La mémoire des livres en Occident, Paris, A. Michel, 1996, p. 12.

Annuaire-manuel de la documentation photographique, publié sous les auspices de la Commission d’organisation du Congrès de la Documentation photographique tenu à Marseille en 1906 et par les soins de M. Ernest Cousin, secrétaire de cette Commission, Paris, Charles-Mendel, 1908, p. 32.

Marc Baratin, Christian Jacob, Le Pouvoir des bibliothèques, op. cit., p. 13.

Elizabeth Edwards, Christopher Morton (dir.), Photographs, Museums, Collections, op. cit., p. 7.

Référence : Estelle Sohier, Olivier Lugon, Anne Lacoste, « Introduction. Les collections de photographies documentaires au tournant du XXe siècle », Transbordeur. Photographie histoire société, no 1, 2017, pp. 9-17.

Transbordeur
Revue annuelle à comité de lecture